L’Association professionnelle des écrivains de la Sagamie (APES) célèbre en 2018 ses 25 ans d’existence. Dans la série des textes signés par les écrivains de l’Association qui racontent un fragment de son histoire, voici, en ce 25 avril 2018, celui de Reine-Aimée Côté. Bonne lecture!
Une appartenance au monde des écrivains
C’est en 2000, qu’Yvon Paré me proposa de faire partie de l’APESCN, Association professionnelle des écrivains de la Sagamie, y compris la Côte-Nord, devenue depuis l’APES. J’en étais vraiment honorée. J’enseignais au secondaire. Je venais de publier deux livres, mais je ne me sentais pas tout à fait écrivaine : le syndrome de l’imposteure me hantait.
Élisabeth Vonarburg était la présidente, lui, le vice-président. Dévoués tous les deux à l’Association, ils apportaient couleurs et diversités aux projets de l’APES. Le festival Mots et Merveilles, le journal Le Lézard, Les correspondances et le recueil ULUFUF : Un lac, un fjord, un fleuve voguaient sur de belles eaux, depuis quelque temps.
Le festival Mots et Merveilles réunissait sur la scène, au Café-Théâtre Côté-Cour à Jonquière, quelques musiciens et quelques écrivains de l’APES avec un ou des invités de marque : écrivains d’une autre région. Les textes lus étaient, pour la plupart, publiés ensuite dans Un lac, un fjord, un fleuve.
La première fois que j’ai vu mon nom écrit en quatrième de couverture du recueil, c’est en 2001 sous le thème Jardins secrets. Le conseil d’administration avait le don de trouver des thèmes inspirants : Jardins secrets, Ombres et lumières, Essoufflement, Sens interdits, Nourritures terrestres et Lettres secrètes : le quatorzième recueil.
Je crois qu’ils forçaient ainsi la main, la plume, des membres de l’APES de façon constante, année après année, et surtout, leur donnaient la possibilité de se renouveler dans l’écriture. Des textes, qui n’auraient sans doute jamais vu le jour, sont nés avec la contrainte du thème. Quelques-uns du conseil nous lisaient, suggérant des corrections. Carol LeBel, Allen Côté, Jean-Alain Tremblay, Jacques Girard, en ont fait partie. Yvon Paré a souvent, pour ne pas dire toujours, chapeauté le recueil. Avec lectures et lancements au Salon du livre du Saguenay.
L’année suivante, la piqure avait fait son effet. Je participai à nouveau au recueil. Cette fois, le thème : Nourritures terrestres. Élisabeth Vonarburg me proposa de réciter un texte au festival Mots et Merveilles. Quelle belle expérience ce fut de côtoyer les auteurs! Parler des mêmes peurs, des mêmes préoccupations, des mêmes défis avec Ghislaine Lavoie, Guy Lalancette, François Barcelo, Jean Désy, André Girard, Jacques Girard, Janik Tremblay, Dany Tremblay, Michel Dufour, Gil Bluteau, Robert Dôle, pour ne nommer que ceux-là… dans les coulisses du théâtre, en prévision du spectacle. Je déclamai Cérémonie secrète. Si sombre était le texte, la lecture me procura une grande joie, nourrie par des applaudissements. Ce fut un coup de pouce dans mon cheminement d’écrivaine. Inespéré! J’ai participé plusieurs fois au recueil, sept, si ma mémoire est bonne. En 2006, je lisais Les mariés d’octobre, au Côté-Cour, toujours. Yvon Paré a jugé dans une de ses chroniques que je signais ma meilleure nouvelle. Une spectatrice, après la lecture des textes, est venue me dire qu’elle avait vécu avec moi ce tableau des deux noyades. Compliments, petits instants qui font grandir.
Le festival Mots et Merveilles, au Côté-Cour, offrait aussi la chance aux membres de l’APES et au public de rencontrer des auteurs de grand talent, des idoles : Suzanne Jacob, Denise Desautels, Paul-Marie Lapointe, Victor-Lévy Beaulieu…
Si Un lac, Un fjord, un fleuve a pu exister, c’est grâce à des éditeurs. D’abord, Les éditions JCL. Sans Jean-Claude Larouche, qui a cru dans les écrivains de la région, qui les a accompagnés par amour pour leur métier, rien de tout cela n’aurait pu durer autant d’années. Puis, ce fut au tour des Éditions SM avec Céline Larouche et Yvon Leblond. La mort d’Yvon Leblond a sonné le glas du recueil. Il aura donné autant d’efforts considérables que d’abnégation pour soutenir ce recueil.
Une sorte d’ULUFUF, pour le quinzième anniversaire du recueil, organisée par Yvon Paré sous le thème Les occasions ratées publiée chez XYZ, a eu lieu, en 2004. J’ai eu grandement de plaisir à composer ma nouvelle, Tango d’acier. En septembre 2018, l’expérience se renouvellera, pour le vingt-cinquième anniversaire de l’APES, chez le même éditeur, supervisée par Jean-Pierre Vidal et Marjolaine Bouchard, avec pour thème : Eaux fortes.
Le festival Mots et merveilles s’est transformé en Mets et mots, dans le cadre de Saguenay en bouffe. Lire un texte dans un restaurant participant, en concordance avec le pays représenté et le menu préparé, était le défi que les écrivains devaient relever. Ainsi est né pour moi Parfum de septembre. Mets et mots n’a pas duré. Il fut remplacé, je dirais, par La Totale. Quatre représentations de ce formidable concept ont déjà eu lieu. Souhaitons qu’il n’y ait pas d’essoufflement.
Les Correspondances, un autre projet de l’APES, donnaient la chance à deux écrivains, le temps d’une rencontre, de partager avec un public leurs vues sur l’écriture, l’avant et l’après d’une publication. En 2004, Danielle Dubé et moi avons été parmi les dernières, je crois, à collaborer à cet événement. Danielle, pour la parution des Olives noires, prix Robert-Cliche, en 1984, en format poche, et pour moi, Les bruits, prix Robert-Cliche, en 2004. Nous avons échangé, en toute simplicité, des moments reprenant la gestation et la mise au monde de nos livres respectifs. Moments qui obligent à revisiter des œuvres car, on le sait, après l’écriture, le livre s’en va : il ne nous appartient plus. Et, pour qu’il continue à vivre, il faut en parler, le dépoussiérer.
C’est un miracle que l’Association soit encore si vivante. Cela tient du bénévolat. Bien des personnes, qui gravitent au sein de l’Association, donnent leur temps sans compter, assurant ainsi la pérennité du mouvement. Faudrait-il plus de concertation et d’aide financière du milieu?
Je vous laisse y répondre.
Reine-Aimée Côté